Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Beyond The Frontiers
Beyond The Frontiers
Publicité
Derniers commentaires
28 octobre 2011

L'Echange

Echange
Clint Eastwood (2008)
Angelina Jolie, John Malkovitch, Micheal Kelly, Jeffrey Donovan
Musique: Clint et Kyle Eastwood
Drame

Los Angeles, 1928. Un matin, Christine dit au revoir à son fils Walter et part au travail. Quand elle rentre à la maison, celui-ci a disparu. Une recherche effrénée s'ensuit et, quelques mois plus tard, un garçon de neuf ans affirmant être Walter lui est restitué. Christine le ramène chez elle mais au fond d'elle, elle sait qu'il n'est pas son fils... (Allocine)

Le Eastwood, cru 2008. Un bon cru, qui une fois de plus dépeint une situation dramatique, le tout avec le style et la classe Eastwoodiens. Une réalisation classique mais personnelle, sans artifice aucun, qui joue de contrastes entre clarté et obscurité, tant sur les éclairages que sur les thématiques abordées : l’homme dans ce qu’il a de meilleur (amour inconditionnel, espoir, honnêteté) et de pire (meurtre gratuit, abus de pouvoir, propagande). Le film est souvent empreint d’une ambiance mystérieuse, tendue et la mise en scène joue de subtilité pour flirter avec quelques éléments horrifique, notamment dans le ranch ou à l’asile. Malgré les contrastes, les personnages ne sont pas caricaturalement bons ou mauvais, mais un mélange des deux (le rejet du faux Walter par Christine Collins est assez violent !). En outre,  le regard porté n’est pas engagé pour un côté ou un autre, mais imprégné d’une certaine neutralité qui rend la confrontation entre ces aspects d’autant plus crue et laisse le spectateur apprécier la situation.

En réalité, l’on peut rapprocher L’Echange d’autres films du réalisateur traitant de relation parents-enfants et/ou mettant en avant une figure féminine, au premier rang desquels se trouvent Mystic River, Million Dollar Baby ou The Bridge of Madison County. C’est évidemment avec  premier que la proximité est la plus forte de par la violence dépeinte, l’isolement dont souffrent le personnage principal et le fait que le film se concentre sur un acte mené sur un enfant. Le contexte s’élargit également aux traumatismes infligés dans la jeunesse, à travers le récit de Sanford Clark et des pressions subies pour devenir complice de son oncle.

Inspiré de faits réels, le scénario Le scénario met en lumière les effets de propagande, corruption et clientélisme qui gangrènent les services policiers et juridiques des années 1920-30. Ces années perdent toute la dimension romantique que le cliché populaire leur a attribuée. De décennie innocente, elle se transforme une société gouvernée par des autorités despotiques qui n’admet aucune concurrence ou voix discordante. Les médias sont alors utilisés pour faire la promotion de ces services arrogants et manipulateurs.

La difficulté et le dramatique de la situation de Christine Collins sont renforcés par l’opposition d’une femme isolée à une organisation presque toute puissante (la police). Au-delà de la lutte menée pour récupérer son fils, c’est plus généralement une recherche de reconnaissance, de réhabilitation et de crédibilité que Mme Collins entreprend, pour elle-même, mais aussi pour les victimes de ce système (souvent d’autres femmes d’ailleurs). A travers son personnage, Clint Eastwood dépeint une société machiste où l’indépendance de la femme constitue tant une déviance du modèle qu’une menace pour l’élite en place. De fait, elles souffrent d’un manque de reconnaissance et toute remise en question du système est qualifié de délirant, voire prétexte à un enfermement psychiatrique. Il est probablement utile de préciser que le droit de vote aux femmes avait été accordé peu de temps auparavant, et que l’asile psychiatrique est alors un moyen de briser les velléités de d’entamer des changements au sein de l’establishment.

Enfin, la peine de mort est également abordée tacitement et son jugement laissé au spectateur lors de l’exécution de Northcott. D’un côté, selon la justice de l’époque, l’horreur de l’acte commis justifie la peine capitale. D’un autre, l’exécution par pendaison se révèle visuellement difficilement soutenable par son réalisme.

A contrario, Clint dépeint une histoire dont le message positif qui prend le pas : la force infinie de l’amour maternel et de l’espoir, qui confinent parfois à l’obsession (« Il faudrait que vous preniez vraiment 10 min de pause un de ces jours »). L’Echange est à nouveau un jeu d’équilibriste entre abattement et espoir. Et la fin ne résout rien, préférant laisser le spectateur seul juge de l’état de l’intrigue. Mais l’espoir des dernières secondes rend le film moins pénible, a posteriori.

On notera une excellente performance d’Angelina Jolie, qui ne s’affiche que trop rarement à ce niveau d’intensité. Dans un rôle dramatique où cette intensité est délivrée tout en justesse alors qu’il aurait été facile de tomber dans l’excès. A ses côtés, John Malkovitch joue la retenue dans son second rôle en parfaite adéquation avec la discrétion dont il fait preuve dans l’aide qu’il apporte.

Bref, L’Echange démontre à nouveau le talent de « raconteur d’histoire » de Eastwood qui nous sert un drame remarquable de noirceur, de désabusement et d’intensité dans les sentiments dépeints reposant tant sur son actrice principale que sur sa réalisation. Un film qui joue d’ascenseurs émotionnels qui n’ont rien d’artificiels pour émouvoir et faire réfléchir. Un bon Clint !

Changeling

Publicité
Publicité
Commentaires
L
La lueur d'espoir durant le film, c'est la conviction que le fils de Collins est vivant, mais celui-ci va en s'amenuisant, supplanté par la noirceure des crimes littéralement exhumés. Je ne l'ai ressentie qu'à la fin, à vrai dire , cet espoir ^^<br /> <br /> <br /> <br /> Oui, Clint livre ici une réalisation du tonnerre et très inspirée :)
2
C'est pesant effectivement, mais je trouve qu'il y a constamment une lueur d’espoir, dans tout le film comme dans son épilogue.<br /> <br /> Pour la lenteur, c'est vrai qu'il y a des scènes ou Clint prend son temps (ces scènes sont d'ailleurs magnifiques).
L
Aaah, super content que tu aies aimé :D C'est un excellent film en effet, mais très lourd. Angelina Jolie y trouve probablement son meilleur rôle! Le film est lent, mais pas long, nuance ;) Il est passé sans problème, mais c'est vraiment émotionnellement pesant. Heureusement qu'il y a les dernières secondes.
2
Enfin vu ! Pour moi l'un des meilleurs Eastwood : noir, profond, saisissant. Angelina Jolie est extra ordinaire dans ce film, la musique de Clint confine au génie et la réalisation est exemplaire. Je n'ai rien à reprocher au film (d'ailleurs, je n'est pas trouvé lent du tout - à coté de J. Edgar, c'est le jour et la nuit à ce niveau).
L
Je ne peux qu'être d'accord avec ton commentaire, bien que l'on retrouve quand même la style Eastwood, à mon sens (dans le thème, dans la réalisation, surtout).
Publicité